Pays avec taux d’intérêt négatif : où les trouver en 2025 ?

La Banque nationale suisse a surpris les marchés en mars 2024 en abaissant son taux directeur, faisant renaître le spectre des taux d’intérêt négatifs. Cette orientation monétaire apparaît alors que la plupart des grandes économies ont choisi la voie inverse, maintenant ou relevant leurs taux pour lutter contre l’inflation persistante.

Ce choix suscite interrogations et débats parmi économistes et investisseurs. Les conséquences concrètes pour les ménages, les entreprises et la stabilité financière font désormais l’objet d’une attention particulière, alors que les perspectives pour 2025 restent incertaines.

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Comprendre les taux d’intérêt négatifs : origines et mécanismes

Les taux d’intérêt négatifs ne relèvent pas d’une fantaisie monétaire. Ils incarnent un outil de politique économique spécifique, activé lorsque la croissance cale durablement. Voici le principe : quand le taux directeur passe sous zéro, ce sont les banques commerciales qui doivent s’acquitter d’une pénalité pour placer leur argent auprès de la banque centrale. L’enjeu ? Les pousser à injecter ces fonds dans l’économie réelle, en prêtant davantage, en investissant, ou en encourageant la consommation plutôt que de laisser dormir les liquidités.

Cette politique n’est pas inédite. Dès 2014, la Banque centrale européenne (BCE) a adopté cette mesure pour la zone euro, cherchant à faire remonter le niveau des prix vers l’objectif de 2 %. En Suisse, la Banque nationale suisse (BNS) a, elle, amorcé la baisse dès 2015, avec une priorité différente : empêcher que le franc suisse ne s’envole trop, et préserver l’avantage des exportateurs du pays. Deux approches, une même logique d’intervention : agir vite pour éviter la stagnation, quitte à imposer un coût inédit aux banques.

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La logique des taux négatifs bouleverse profondément les marchés financiers. Les modèles de valorisation sont ébranlés, les rendements des obligations s’enfoncent, les flux de capitaux prennent des chemins inattendus. Chaque mouvement des banques centrales se répercute sur le prix de l’immobilier, la capacité d’emprunt des ménages et la dette publique des États.

L’éventuel retour aux taux négatifs en Suisse souligne la singularité du pays : inflation maîtrisée, franc scruté de près, et stratégie indépendante face aux choix de la BCE. Le moindre signal envoyé par la BNS peut déplacer des flux financiers massifs, tant les marchés restent attentifs à la trajectoire helvétique.

Pourquoi la Suisse fait figure d’exception en 2025 ?

La Suisse persiste là où le reste du continent hésite. Alors que la zone euro peine à juguler une inflation qui dépasse encore la cible, la Confédération affiche pour 2025 une inflation microscopique de 0,3%. La Banque nationale suisse (BNS) s’affranchit ainsi du tempo européen, et se prépare à retenter l’expérience des taux d’intérêt négatifs pendant que la BCE temporise.

Comment expliquer ce virage ? La force du franc suisse, systématiquement recherché comme valeur refuge, complique la vie des exportateurs helvétiques. Pour freiner cette appréciation, la BNS ajuste son taux directeur à la baisse. Recourir à la mécanique des taux négatifs devient alors une option assumée, quitte à désarçonner les marchés.

Voici ce qui caractérise le choix suisse en 2025 :

  • Un pilotage strict de l’inflation et des anticipations de prix stables, qui rassurent ménages et investisseurs
  • Une gestion active du taux de change, quitte à provoquer quelques crispations avec les partenaires commerciaux
  • Une politique monétaire qui ne s’aligne pas sur le rythme de la BCE, mais suit ses propres enjeux

L’écart se creuse : l’euro fléchit de 2,1 % face au dollar, alors que le franc suisse s’impose comme valeur refuge. Sur le terrain des taux négatifs, la Suisse trace sa route en solitaire, fidèle à sa tradition d’indépendance monétaire.

Conséquences concrètes pour les épargnants et les entreprises suisses

L’application des taux négatifs par la BNS rebat les cartes pour tous les acteurs de la place financière helvétique. Pour les épargnants suisses, les conséquences sont immédiates : le rendement de l’épargne s’étiole, les comptes courants ou les dépôts à terme voient parfois leurs intérêts devenir nuls, voire négatifs, et certains établissements appliquent désormais des frais de gestion. Les particuliers se retrouvent face à un dilemme : accepter la perte progressive de valeur ou se tourner vers des placements plus risqués, sur les marchés financiers ou dans l’immobilier.

Du côté des entreprises, la situation est à double tranchant. Le coût de l’emprunt diminue, facilitant le financement de nouveaux projets et soutenant l’investissement. Mais cette manne n’entraîne pas systématiquement un boom d’activité : l’environnement international reste incertain, la concurrence mondiale féroce, et seuls les groupes solides profitent pleinement de l’aubaine, notamment ceux capables d’absorber les variations parfois brutales du franc suisse.

Quant au marché de l’immobilier, la logique semble paradoxale. Les taux bas devraient favoriser l’accès à la propriété ou à l’investissement locatif. Pourtant, les prix demeurent très élevés, et beaucoup hésitent à s’endetter dans l’attente d’une éventuelle correction du marché. Les ménages suisses jonglent donc entre opportunité et prudence, tentés par des crédits attractifs mais conscients des risques de surchauffe.

Pour mieux cerner l’impact de cette politique, voici les principaux effets à surveiller :

  • Pour les épargnants : rendements en berne et multiplication des frais sur les dépôts
  • Pour les entreprises : crédit plus accessible, mais environnement incertain
  • Pour l’immobilier : marché dynamique, mais menace de surévaluation persistante

La stratégie des taux négatifs agit comme un test de résilience : elle pousse chacun à revoir sa gestion du risque, la solidité de ses finances et sa vision à long terme, qu’il s’agisse d’un particulier ou d’un dirigeant d’entreprise.

Perspectives économiques : quels scénarios pour l’Europe et la Suisse à l’horizon 2025 ?

L’Europe avance à petits pas. La zone euro table sur une croissance de 0,9 % en 2025, avant un redressement graduel. Les grands pays, comme la France ou l’Allemagne, peinent à dépasser 0,6 % et 0,2 % respectivement. L’inflation s’ajuste, prévisible autour de 2,3 % en 2025, pour ensuite se tasser sous les 2 % en 2026. Le marché du travail reste solide, avec un taux de chômage qui stagne à 6,3 %, niveau rarement atteint ces dernières décennies.

La Suisse, elle, continue de tracer sa voie. Inflation presque nulle, croissance modérée mais environnement monétaire stable : la BNS garde toutes les options ouvertes, y compris celle des taux négatifs, profitant de la robustesse du franc et d’une inflation maîtrisée. L’économie suisse, portée par ses industries innovantes et la valeur ajoutée de ses exportations, reste à l’écart des remous majeurs.

Mais le contexte international n’est pas sans nuages. Le commerce mondial ralentit sous le poids de la baisse des échanges entre la Chine et l’Europe. Les exportations européennes reculent, les salaires progressent lentement, et la demande intérieure tente de compenser la faiblesse du commerce extérieur. Sur le front monétaire, la BCE enclenche une détente progressive des taux, tandis que la FED reste prudente, maintenant ses taux plus élevés. Les investisseurs institutionnels scrutent l’évolution des spreads, la prime de risque et les mouvements de l’euro face au dollar.

Pour résumer les tendances de 2025, voici les trajectoires à surveiller :

  • Zone euro : reprise timide, inflation sous contrôle, emploi solide
  • Suisse : inflation très basse, franc robuste, politique de taux négatifs en embuscade
  • États-Unis : ralentissement de la croissance, incertitudes sur la direction des taux

L’année à venir s’annonce comme un laboratoire grandeur nature pour les politiques monétaires. La Suisse, fidèle à ses choix singuliers, pourrait bien continuer à dérouter les observateurs et inspirer, à contre-courant, de nouveaux débats sur la gestion des taux d’intérêt à l’ère de l’incertitude.